mardi 27 juillet 2010

Tyrosse, arène philosophique.


Saint-Vincent-de-Tyrosse/25 juillet 2010
6 Batasar Iban 6.
Rafaelillo (fraise mixée et plaqué or).
Luis Bolivar (pistache Carte d'Or des Incas).
Rubén Pinar (volet de Provence et or ou pas or, that is the question).
9/10 d'arénes. Temps couvert. Température idéale.
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Pour connaître les dominantes de couleurs dans un paysage, les peintres plissent les yeux. Appliquons la recette à cette corrida, pour en dégager l'essentiel, car je ne me sens ni le courage, ni la cruauté, de vous en infliger un compte-rendu détaillé.
- 1/ Les revoilà! Quel plaisir de retrouver les Baltasar! Quelles carrosseries! Quels fuselages! Si le ramage ne correspond pas toujours au plumage, on s'en rapproche et, si ça continue sur cette lancée, l'élevage va retrouver le lustre d'antan. Tendance générale à faire le serpentin (ça se retourne vite), à mesurer ses charges, à ne pas toujours baisser la tête. Mais quand ça devient vraiment bon, ça donne le quatrième: de la charge à 10 mètres, de la répétition, de la présence en piste et de l'engagement. Seule une certaine lourdeur de charge, s'accentuant au fil de la faena, l'a privé d'une vuelta posthume, pourtant réclamée par le public.
-2/ Le public au rendez-vous. Neuf-dixième d'arène, c'est bien. Un public, moité familial et festayre et moitié aficionado. Autrement dit, de l'exigence, tempérée par de la bonne humeur. Un équilibre agréable.
-3/ L'homme du "coup de feu". Rafaelillo fait penser à un garçon de bar à l'heure des tapas. Plus affairé en piste que lui, impossible. Un oeil sur les cornes, l'autre sur les terrains, le troisième dans le callejon, le quatrième sur le tendido et un sourire pour l'un, un mot ,vite fait ,à l'autre, les pieds (il en a au moins six) toujours alertes - c'est un euphémisme pour ce véritable Zébulon, tournicoti, tournicoton! Un "vaillant", au plein sens du terme: courageux et ne rechignant pas à la besogne. On aimerait, par moment, que cela se calme mais pour l'instant ce n'est pas possible; c'est cette frénésie qui fait tenir debout le château de cartes.
-4/ "Et apparut le prince Inca". Lorsque Luis Bolivar tombe sur un combattant médiocre, c'est tout un spectacle qui, à lui seul, vaut le billet. En l'occurrence , un gros manso puissant, aimanté par la querencia du toril, comme une mouche par le sucre. Quelques vaines tentatives pour retenir son fuyant camarade de jeu persuadèrent rapidement "The" Luis que la cause était entendue. Alors apparut, peu à peu ,sur son visage, un mélange de mépris, de dégoût et d'ennui blasé qui le fit ressembler, insensiblement, à celui du Grand Inca, un jour de pluie. Visage fermé, énigmatique et dédaigneux des princes et des monarques mal servis: Curro Romero, François Mitterrand et parfois Morante, quand il quitte son air de petite frappe de quartiers mal famés.
-5/ "Il n'a pas le tempo dans la peau. Un mou?". De son premier, Ruben Pinar ne sut pas prendre le rythme. Tirant trop vite le bras ou se faisant accrocher la muleta, il fut dans l'incapacité de s'accorder au toro. Cette misère de mésentente, d'impossibilité à entrer dans le jeu de l'autre, me rendirent le jeune torero irritant. Cherchait-il à servir une leçon apprise par coeur? N'a-t-il pas su voir ce toro? Est-il mou ou lent de nature et a-t-il éprouvé des difficultés à entrer dans la rapidité, la vivacité du Baltasar? La facilité avec laquelle il a accompagné l'extrême lenteur du sixième, peut le faire penser.
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Se retrouver sous les arbres de la jolie placita ombragée reste un plaisir... Dehors, les bruits de la fête qui parviennent, discrètement assourdis... Des voisins de gradins loquaces et curieux...Un orchestre qui joue bien...
Avant la course, en regardant par dessus l'arène, nous pouvions apercevoir les six Baltasars qui allaient être lidiés, les chiqueros étant à ciel ouvert: l'un était inquiet, le second s'était couchait, le troisième mangeait... Nous savions qu'ils allaient mourir, eux ne le savaient pas. J'en ressentis un léger malaise, un petit mal être. Je me détournais vers les gradins presque remplis, je regardais les spectateurs. Certains semblaient excités, d'autres s'étaient assis, d'autres encore mangeaient... curieux jeu de miroir... Tyrosse, arène philosophique!...L'arrivée du président vint interrompre ma réflexion dissertante. Je regardais la porte du patio s'ouvrir. Les toreros entrèrent, verticaux, décidés, scintillants. Du bout de sa zapatilla droite, Ruben Pinar dessina sur le sable, à l'intersection du cercle des picadors, un signe de croix. Je pensais aux toros. Je regardais autour de moi. Un peu plus loin, à ma gauche, un mangeur de frites finissait sa barquette. Mentalement, je me signais. Et le paseo débuta.

1 commentaire:

  1. Le baltasar reste égal a lui même et quel 4 eme j'ai adore sa charge longue et puissante!! Vuelta pourquoi pas oui il l'aurait mérite et surtout il est tombe sur rafaelillo!!
    Philippe Wargnier (source facebook)

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