dimanche 17 juin 2012

Distorsion

Caste en berne et faiblesse patente liées à une industrialisation de l'élevage actuel qui perdant son caractère extensif a égaré son âme, le toro est rendu responsable de bien des maux de la corrida moderne.
Monopolistique , l'encaste dominante est clouée au pilori.Le sang bleu de Domecq coule dans bien des veines taurines.
Du sang bleu au sang de navet anémié et sans vigueur il n'y a qu'un pas que bien des amateurs franchissent sans discernement:dans le même sac tous les cornus du genre!!!
Et pourtant, il y en a bien qui défendent chèrement leur peau parmi ces bestiaux là.
Mais quand ils le font , rencontrent-ils des adversaires à leur hauteur?
Le risque calculé au nom des intérêts économiques et financiers a pris le pas sur la passion et la déraison, l'émergence puis le règne des écoles taurines en tout genre n'en sont que la triste conséquence.
Ne plus laisser la place à l'improvisation, standardiser pour réduire les risques encourrus, se donner toutes les chances de réussir sont symboliques de notre société qui punit le faible, méprise l'échec et ne pardonne pas l'erreur.Société MacDo, qui substante et nourrit grassement mais ne régale pas!
L'ivresse est devenue bien plus importante que le nectar.
Il faut bien dire que le goût du public s'est aseptisé.
Aux combats épiques, aux luttes acharnées, il préfère aujourd'hui le confort douillet et rond de la circularité.C'est rassurant la rondeur:facile à ingérer, facile à digérer, pas dérangeant .
Alors les professionnels de la profession ils se débrouillent pour servir la tambouille demandée.
Alors le toro, forcément il devient moins sauvage, plus comestible.
Et quand ses aspérités se font plus fortes, face à une telle adversité il n'y a plus grand monde pour risquer les coutures du costume c'est certain; trop d'enjeu, trop de fric à perdre pour les uns pas assez à gagner pour les autres.
Le problème des encastes minoritaires qui s'essoufflent et disparaissent, n'est au final que la partie visible de l'iceberg.Combien de toreros aujourd'hui ont les capacités techniques et mentales pour affronter un toro même domecquisé qui sort de cette fade norme, et quand bien même combien en ont-ils l'envie tout simplement?
Même à Madrid l'arène de référence qui vous consacre; j'ai vu en quelques jours trop peu d'engagement et trop peu de professionalisme de la plupart des acteurs en piste.
Entre des maestros sans âme ni personalité, et des subalternes peu appliqués à bien faire leur métier, le mal est bien profond et ne touchent pas que les toros.
Le système est décadent et nous participons ne nous leurrons pas  à sa perversion à force d'exigence de pacotille.
Transcender des journées grises par des triomphes bienveillants où les oreilles doivent se couper par panier après des numéros plus près du cirque que du combat.
Au prix du sang Castella dans un Las Ventas admiratif est sorti cette année des sentiers battus.
Avec la tauromachie morbide de Jose Tomas d'avant Aguascalientes qui attirait autant qu'elle revulsait, le public s'encanaille, mais au delà de ces folies passagères son standard est ailleurs.
Ce n'était pas mieux avant qu'on ne s'y trompe pas mais simplement différent.
Au siècle dernier,sauvage et révolutionnaire, la corrida était plus en phase avec son époque.
Dans le monde d'aujourd'hui exsangue elle étouffe dans son carcan d'argent et de morales bien pensantes.
Les hommes qui en vivent, cherchent à la rendre plus lisse, moins incertaine,plus profitable et plus rentable.
Le toro n'est plus une cause du mal, mais une conséquence de ce que nous avons bien voulu en faire.
Il n'est pire intolérance que celle de la raison disait le basque de Unamuno.
La corrida doit retrouver sa déraison et rester anachronique dans un monde sans surprise.
C'est sa raison de survivre.
Mais arrêtons de nous enfermer dans des chapelles.
Le toriste laisse son affect à la porte des arènes pour porter dogmatiquement des jugements sans concession sur l'état délabré de la tauromachie et de son aficion.
Le toreriste se lamente de voir si peu de toros se prêter avec vigueur au jeu que lui proposent les idoles de papier carton.
Aimons la tauromachie pour ce qu'elle est, et pas toujours pour ce que nous fantasmons qu'elle pourrait-être et pour cela acceptons qu'elle sorte de ses cadres actuels aux codes trop bien définis et exigeons de ses acteurs qu'ils arrêtent d'être sages!!!
En acceptant de ne plus paraître pour se contenter d'être tout simplement, les toreros auront bien plus de pouvoir que celui économique du G10.
En retrouvant l'esprit bohème du defi de la mort pour la beauté du geste, ils pousseront paroxystique l'utopie "corrida" dans un retour en arrière bienfaisant.
Sont-ils prêts pour cette ultime bravade?
Aujourd'hui le doute est permis et pourtant dans les champs , pour l'instant tranquilles,bons ou mauvais des toros de toutes origines attendent ....

Quelques articles: Papa Gato, Les Clameurs La chute d'Icare)
                              Pedrito, Puraficion Ignorance
                              Paul Bosc; Vingt Passes Pas Plus La corrida est morte vive la corrida
                              Olivier Deck, Tauromaquis L'adage renversé

1 commentaire:

  1. pour conclure ton article : les domecq attendent de se faire embarquer pour la course "prévu", alors que les autres encastes attendent qu'on les achète...

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