jeudi 12 avril 2012

Le manège désenchanté

Au pays du bois joli sur le manège du Père Pivoine s'amuse la petite Margote. Zébulon, personnage monté sur ressort, la transporte grâce à une formule magique, « Tournicoti... Tournicoton... ».
Au pays de la tauromachie quand du coin du bois surgit l'ennui, dos tourné , contorsionné se donnent encore et toujours des circulaires inversées.
Parle à mon cul , ma tête est malade formulent bien des toreros en traçant des ronds, tristes sillons vides de sens.
Tournicoti...Tournicoton...Margote sur son gradin se pâme d'aise.
Le père Pivoine en costume de lumières la rend joyeuse.
Tourner en rond c'est toujours tromper l'ennui, sans trop exiger de la bestiole à cornes: essoufflée, fatiguée mais toujours fascinée par le tour de manège proposé.
A la poursuite de sa queue de Mickey qu'on lui fait miroiter, prête à tourner sans fin et sans vertige.
Sur elle, guère d'effet mais sur le public bien trop encore!
Il faut dire qu'au prix où vont les choses, le spectateur en veut pour son argent!
Peu importe le nectar et seule l'ivresse compte.
Alors pour un point d'interrogation que devrait faire tout toro bien conduit, çombien de cercles donnés dans un périmètre contraint?
Contraint par le manque de souffle et de pouvoir de l'animal, contraint par l'imagination et le talent en berne du torero, contraint par le manque d'exigence des publics d'aujourd'hui.
Elle m'exaspère cette passe née des années 80.
A l'époque réduire les terrains était révolutionnaire,l'enthousiasme que provoqua le toreo circulaire influença le goût du public façonné pour toute une génération par les soirées Canal+.
De l'Ojedisme naquit une nouvelle race de toro en recherche l'oxygène dès qu'il lui faut avaler de l'espace.La toréabilité neologisme taurin fit son apparition.
Aujourd'hui encore nous en payons le prix.
Et pourtant quoi de plus beau qu'une charge de vingt mètres qui s'engouffre dans une muleta, d'un muffle indompté rasant le sable qui ne s'en laisse pas compter?
Alors oui elle m'exaspère cette circulaire inversée pour tout ce qu'elle contient ou plutôt qu'elle ne contient pas.
Ne subissons plus sans réagir le tourniquet magique, refusons la poudre aux yeux qui nous est envoyée à longueur de temporada.
Que cette tartuferie cesse au profit d'une tauromachie fondamentale.
Elle nécessitera des animaux de caste, de la bravoure revêche et de la noblesse piquante.
Un rêve, une chimère peut-être mais une révolution ne nait-elle pas d'une utopie et comme le faisait dire Audiard dans une singe en hiver "Que ce soit la révolution ou la paëlla, rien de ce qui est espagnol n'est simple"

3 commentaires:

  1. Sifflons cette passe !!! Vomissons là de hurlement !

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  2. Très bien l'article. Je partage tout à fait. Cette passe s'est imposée par le manque de culture et de critère des masses. Le devoir des bons toreros est de l'éliminer
    Albert Taurel (source FB)

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  3. Je ne suis pas loin de penser comme vous sauf qu'il ne faut pas confondre l'original et les imitateurs, le réellement émouvant, fruit d'une réelle inspiration créatrice et une récitation bien apprise à l'école, dictée depuis la barrière parce que le pauvre torero n'a aucune inspiration en piste.
    Vaut-il mieux encenser ces séries interminables de 8 à 10 muletazos avec à chaque fois une sortie par le haut? Vaut-il mieux encenser ces faenas toutes stéréotypées et totalement prévisibles (Presque plus de toreo de cape, et quand il y en a, des véronique en reculant le pied et bien sûr on remate par la media parce que c'est QUE comme ça qu'il faut faire, vas-y que je commence la faena à droite en donnant de la distance en essayant d'envoyer le toro le plus loin possible et termine par un changement de main dans le dos pour remater par un pecho sur la même corne, vas-y que je termine ma faena par des manoletinas ou des bernardinas).
    Est-ça la tauromachie fondamentale? Une tauromachie tellement scolaire et tellement prévisible? Le spectateur d'aujourd'hui ne vibre plus parce qu'il voit quelque chose d'extraordinaire qui lui parle à lui seul, l'émeut ; il vibre parce qu'on lui dit que c'est là qu'il doit vibrer, parce qu'on lui dit ce qui est fondamental et orthodoxe et ce qui est vilain tout plein et qui doit être sifflé.
    Personnellement, je m'emmerde aujourd'hui sur les gradins. La tauromachie d'aujourd'hui tout comme le public qui l'applaudit est triste à mourir, elle manque cruellement de personnalité. Je me réfère souvent aux dessins de Jean Ducasse qui en trois coups de pinceau vous permettait de reconnaître Ojeda, Cano, Manzanares, Mendes, etc. Il serait bien embêté aujourd'hui notre regretté peintre landais. Je suis désolé mais la tauromachie tout comme l'aficion, ça ne peut pas s'apprendre dans les livres ou les écoles. On devrait vibrer avec son cœur, pas avec son cerveau. Et moi, vous l'aurez compris, je n'ai jamais autant vibré sur les gradins d'une arène que lorsque Paco Ojeda parlait à l'oreille des toros et qu'il leur disait ce qu'il devait faire. Lorsqu'il toréait à droite ou à gauche toujours par le bas et dès que le toro donait un signe d'hésitation, il rematait sans bouger avec une liaison en toreo contraire (même main donc mais corne opposée), faisant dessiner un 8 parfait à l'animal. (Bonjour les piétinements ridicules aujourd'hui). Et sa liaison de la trinchera avec reprise sans bouger d'un redondo infini. Libre à vous de croire que tout cela n'était que de l'esbroufe. Le toro, il faut le dominer. Sa charge naturelle est rectiligne. Le dominer c'est lui imposer la courbe.
    Il y a les nostalgiques et les aigris qui répètent qu'avant c'était mieux et il y a les soit disant modernes qui critiquent tout ce qu'il y a eu avant et prônant un retour aux valeurs fondamentales pour pas dire fondamentalistes. Gare à la pensée unique!
    Ph. L

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